Omar l'a tuée

Vérité et manipulations d'opinions. Enfin une information contradictoire sur l'"Affaire Omar Raddad".
«En 1894 on condamnait un jeune officier parce qu’il avait le seul tort d'être juif ; en 1994 on condamnait un jeune jardinier qui avait lâchement tué une femme âgée sans défense. En 1906 Alfred DREYFUS fut réhabilité alors que Omar RADDAD est un condamné définitif. Un était innocent, l'autre est coupable ». - Georges Cenci

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Affaires Seznec – Raddad : mêmes intrigues !

Via le formulaire de contact, un internaute me fait connaître son appréciation sur la tenue de ce site et évoque le livre qu'il a écrit sur l'affaire Quéméneur / Seznec : « L'affaire Seznec : Nouvelles révélations ».

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Ayant rédigé en 2005 un billet sur cette affaire criminelle, paru dans la revue Aventures et dossiers secrets de l'Histoire, qu'il me soit permis de le porter à la connaissance des lecteurs.

En mai 1923, la disparition de Pierre Quéméneur, homme d’affaires et conseiller général du Finistère, donne naissance à une des plus extraordinaires affaires judiciaires du vingtième siècle. Un associé de la victime, Guillaume Seznec, est condamné par la cour d’assises de Quimper en novembre 1924. L’absence d’aveux, de corps et d’arme du crime a donné corps à toute une littérature innocentiste qui a prospéré grâce à la méconnaissance des pièces du dossier, accablantes pour le condamné.
Il est des affaires judiciaires qui ne meurent jamais, résistant au temps. Plus les années passent, plus les enquêtes parallèles et la désinformation les enrichissent de fantasmes et de contrevérités anarchiques et souvent commerciales. Elles s’opacifient d’autant plus que la passion et l’intérêt l’emportent sur la raison.
Les articles succèdent aux articles, les livres aux livres, les comités de soutien aux comités de soutien. Chacun fait étalage de sa vérité qu’il n’a pas ou qu’il n’a pu ou voulu rechercher dans le dossier criminel et se répand, imaginatif et convaincu dans des démonstrations qui ne résistent guère à l’examen des faits.
Une information, une fois lancée, est reprise par l’ensemble des médias, en boucle, sans que soit vérifiée son authenticité. La justice est mise à mal, les enquêteurs vilipendés, tous coupables à leurs yeux de l’erreur judiciaire dont ils sont les seuls à ne pas être persuadés. Et la grande majorité des citoyens, crédule et manipulée, fait confiance aux hommes qui maîtrisent l’information et se détournent de ceux qui ont la noble mission de rechercher la vérité et de rendre justice.
Les abus journalistiques, la télé-réalité, les scoops qui produisent de l’Audimat et font vendre du papier prennent le pas sur le communiqué, la mise au point, l’arrêt ou le jugement qui rétablit les faits, démontre la manipulation, écarte les intrigues.
Le mot qui fait peur est ainsi lâché à l’opinion publique, si prompte à s’émouvoir : l’erreur judiciaire - bien plus rare cependant que l’on peut l’imaginer - marque alors les esprits, s’insinue dans notre mémoire, nous fait douter de la décision de justice.
Les passionnés, romanciers opportunistes, donneurs de leçon, malveillants de tout acabit, terroristes intellectuels de l’intelligentsia ne font que recomposer l’histoire d’un crime. Chacun a sa théorie, ré-écrit l’histoire pour nous convaincre de l’innocence du condamné. Mais, d’aucuns ont eu accès au dossier ou l’interprètent. A leur façon, selon leur norme, leur éducation, leur courant de pensée, leur sensibilité ou pire encore leur intérêt. Ainsi, sont livrées à l’opinion publique, hypothèses douteuses, élucubrations en tout genre, critiques peu amènes envers la justice au mépris de l’autorité de la chose jugée.
Que penser des avocats médiatiques, spécialistes des plateaux de télévision et des salles de pas perdus qui se font remarquer habituellement après les arrêts et jugements de condamnation de nos cours et tribunaux ? Des porteurs de micros et caméras, leurs courtisans, propagateurs d’informations qu’ils ne prennent pas toujours la peine de vérifier et qui se battent rarement la coulpe lorsque les faits leur donnent tort !
Il en est ainsi de nombreuses affaires judiciaires où l’opinion a été sollicitée et carrément manipulée par des campagnes, bien orchestrées, tendant à la révision de certains procès ou par des films qui ré-écrivent l’histoire pour nous convaincre de l’innocence des condamnés au mépris de l’autorité de la chose jugée. Souvenons-nous des affaires Dominici, Ranucci, Raddad, Weber, Villemain et tant d’autres qui en sont les illustrations. Celle de Guillaume Seznec n’a pas échappé à cette règle et l’on vous parle encore aujourd’hui de mystère. Huit décennies de mystères ! Ou d’intrigues ?
Bref rappel historique : Seznec Joseph Marie Guillaume dit Guillaume Seznec était condamné le 4 novembre 1924 aux travaux forcés à perpétuité, peine aujourd’hui disparue de notre Code pénal, pour le meurtre de Pierre Quéméneur. Déporté d’abord à l’île du Diable puis à l’île du Salut et à St Laurent du Maroni, il tentait à trois reprises de s’évader. Gracié le 2 avril 1946 par le général de Gaulle, il était de retour en France le 1er juillet 1947. Renversé par une camionnette en 1953, il décédait le 13 février 1954 des suites de cet accident. Il a toujours clamé son innocence.
Depuis, la révision du procès aura été rejetée à treize reprises. Le dernier arrêt de rejet en date, le 26 juin 1996, était assorti de commentaires précis sur tous les points litigieux présentés par la famille Seznec, aucun élément nouveau n’était considéré suffisant pour justifier une révision du procès.
Le garde des Sceaux, ministre de la justice, Marylise Lebranchu, introduisait alors, le 30 mars 2001, une demande en révision. Rappelons cependant que Marylise Lebranchu, originaire de Morlaix comme Seznec, était déjà à la pointe du combat pour la réhabilitation de Guillaume Seznec alors qu’elle était attachée parlementaire.
Au cours de l’audience du 24 janvier 2005, devant la commission de révision des condamnations pénales, le procureur général se déclarait favorable à une révision, faisant même état de sa conviction personnelle de l’innocence de Seznec. A juste raison, Mme Anzani, présidente de ladite commission ne perdait pas de vue que les magistrats n’étaient pas là pour faire plaisir à une campagne de presse ou à un ministre. Le ton était donné. Comment ne pas apprécier l’indépendance statutaire de cette magistrate de renom mais aussi, en la circonstance, son courage intellectuel. Preuve s’il en est que la justice s’exerce en toute sérénité, loin des passions et des pressions. Le 11 avril dernier, la commission de révision saisissait la chambre criminelle de la Cour de cassation qui statuera comme cour de révision, par arrêt motivé non susceptible de voie de recours : arrêt de rejet si la demande était considérée mal fondée, arrêt d’annulation de la condamnation si elle l’estimait fondée.
Je ne peux m’empêcher de faire un rapprochement avec le déroulement de la procédure en révision de l’affaire Omar Raddad. L’avocat général de la commission de révision avait admis que des faits nouveaux ou des éléments inconnus de la juridiction lors du procès devant la Cour d’assises étaient de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du condamné. Le dossier était transmis à la chambre criminelle de la cour de cassation qui, à juste titre, suivait les pertinentes observations de l’avocat général, Laurent Davenas, et rejetait la requête. Étant précisé qu’une telle décision est prise au niveau de la cour de révision par les quatre sections de la chambre criminelle à l’exception des magistrats ayant siégé à la commission de révision. A la majorité donc des juges suprêmes de la plus haute instance judiciaire française. Ce qui lui donne encore plus de légitimité.

Bernez Rouz, historien de formation et journaliste vient de publier L’affaire Quéméneur-Seznec, Enquête sur un mystère (éditions Apogée). L’auteur nous livre ses réflexions à partir du dossier dont il a été autorisé à compulser la copie. Il produit plusieurs documents inédits, et compare les données du dossier criminel aux écrits de ses confrères de l’époque. Comme il l'expose dans l’avant-propos de son ouvrage: « les lecteurs trouveront ainsi des éléments fiables pour comprendre et se faire une opinion. »
Ce livre est-il dérangeant pour les innocentistes ? Denis Seznec, petit-fils du condamné, ne se déclarait-il pas indigné de sa parution quelques jours avant la décision de la commission de révision ! Les bien-pensants ont-ils seuls le droit de se faire éditer pour raconter n’importe quoi, se pavaner devant micros et caméras, se livrer à tous les excès médiatiques ! Si l’on compulse l’abondante et excessive littérature de cette affaire, il est vrai que ce livre semble être le premier à ne pas prendre fait et cause pour l’innocence de Guillaume Seznec. Un ouvrage impartial et à contre-courant en quelque sorte. Ils sont si rares !
Personnellement, je ne connaissais aucun détail de ce dossier. Je n’aurai lu aucun autre livre avant de consulter celui de Bernez Rouz. Je n’avais donc aucun préjugé, apriorisme ou certitude. Je vais tenter de m’installer dans le rôle de juré pour analyser les éléments mis à la disposition du lecteur dans son ouvrage et de répondre aux questions posées au jury. En mon âme et selon ma conscience ! Dire si Seznec est coupable d’avoir dans la nuit du 25 au 26 mai 1923 volontairement donné la mort à Pierre Quéméneur ; dire s’il a agi avec préméditation et ou guet-apens ; dire s’il est coupable d’avoir commis un faux en écriture.
Cette affaire judiciaire sera toujours voilée de mystère, principalement en raison de la non-découverte du corps de la victime, Pierre Quéméneur. Cependant force est de constater que les annales criminelles ont déjà connu des dossiers sans cadavres (Landru, Michaux, Turquin) et des meurtriers condamnés malgré leurs dénégations. L’affaire Quéméneur Seznec n’est pas un cas isolé ! Un crime sans aveu et sans cadavre n’est pas nécessairement une erreur judiciaire.
Régulièrement depuis quatre-vingts ans, cette affaire fait la Une de l’actualité, et les demandes en révision sont rejetées les unes après les autres. Comment ne pas y voir, en toute objectivité, un dossier de l’accusation plus solide que l’on prétend ! L’enquête de police comportait-elle des lacunes ? L’instruction a-t-elle été efficiente, menée à charge et à décharge par un juge compétent ? N’est-ce pas ce que rabâchent habituellement les donneurs de leçons qui oublient bien sûr de vous parler de la responsabilité d’une certaine presse dans la manipulation des faits. C’est sous ces trois angles que j’ai examiné le dossier, en deuxième lecture ; la première m’ayant convaincu de la culpabilité de Guillaume Seznec.

Sans entrer dans le détail de la procédure, le procès pénal comporte obligatoirement en matière de crime plusieurs phases obligatoires et successives : tout d’abord l’enquête judiciaire est effectuée sous la forme préliminaire ou en flagrant délit par un service de police ou de gendarmerie sous la direction du procureur de la République ; après le réquisitoire introductif d’instance d’un magistrat du Parquet, c’est l’information judiciaire conduite par un juge d’instruction qui, le plus souvent, délègue ses pouvoirs à des officiers de police judiciaire de la police ou de la gendarmerie. Après les phases enquête et information judiciaire vient le jugement devant une cour d’assises.
Plusieurs services de police concouraient à l’enquête policière : la police mobile de Rennes investiguait en Bretagne alors que la sûreté générale de police de Paris qui avait compétence sur tout le territoire national allait enquêter à Paris, Le Havre et dans la région de Dreux. Ce sont des commissaires de police qui allaient prendre la direction des investigations et effectuer eux-mêmes les principaux actes de police judiciaire. Le travail d’enquête ne me semble souffrir d’aucune critique tant il a été rigoureux et complet : actes d’investigations effectués à grande échelle ; recherches importantes du cadavre de Pierre Quéméneur, malgré leur négativité; questions posées pertinentes ; hypothèses de travail intelligentes et sensées. Hélas, ces policiers n’avaient pu profiter de l’appui de la police technique et scientifique dont les enquêteurs bénéficient aujourd’hui. Gageons que la Cadillac, la malle de la victime et les écrits, notamment, " auraient parlé".
On peut toujours critiquer une enquête judiciaire, polémiquer, ergoter, dire qu’elle est incomplète, menée à charge uniquement. Ou considérer comme le remarque l’auteur que l’enquête de voisinage était insuffisante. Mais en toute conscience ces critiques ne peuvent être faites aux enquêteurs de l’époque qui, confrontés aux comportements, manœuvres et manigances de Seznec, au fur et à mesure du déroulement des investigations, ne pouvaient qu’être intimement persuadés de sa culpabilité. Un suspect peut ne rien avouer mais nier l’évidence même de faits avérés, se contredire, tergiverser, mentir et se rétracter ne sont pas les meilleurs moyens pour prouver son innocence. Seznec devenait le coupable idéal, un faisceau de présomptions de culpabilité était réuni contre lui par les services de police. De plus, l’accumulation de renseignements de moralité on ne peut plus défavorables ne plaidait pas en sa faveur. Ses rapports d’affairistes étaient conflictuels et il était compromis dans de nombreuses affaires qu’il perdait régulièrement, se faisant ainsi de nombreux détracteurs. Il apparaissait comme un personnage trouble, peu scrupuleux, rusé et manipulateur, menteur, usant d’expédients pour parvenir à ses fins. Sans scrupule, il ne reculait pas devant l’emploi de moyens frauduleux et malhonnêtes.
Alors que Pierre Quéméneur était décrit comme un homme loyal et honnête qui avait fait fortune pendant la guerre en commerçant du bois. Reste que sa probité était mise à mal en raison de fraudes sur les bénéfices de guerre et l’alcool, mais à cette époque ce genre d’errements était assez répandu. Célibataire, aisé, propriétaire terrien, affairiste, c’était un notable. Il était conseiller général du Finistère. Grand brasseur d’affaires, Quéméneur malgré quelques revers de fortune, était loin d’être aux abois au moment de sa disparition. Rien ne laissait présager une disparition volontaire.
L’information judiciaire était confiée dans un premier temps à un juge d’instruction de Brest, puis en opportunité géographique à Émile Campion, juge d’instruction à Morlaix. Bernez Rouz cite un témoignage qui décrivait ce magistrat « originaire du pays, connaissant la psychologie des habitants, leur langue, et leurs habitudes, et le présentait comme un homme loyal et franc, scrupuleusement honnête, pas du tout désordonné comme ses détracteurs ont voulu le dépeindre.» Force est de constater qu’en fonction des données de l’enquête, les décisions d’investigations du juge Campion étaient empreintes de logique.
La lecture dépassionnée du dossier est significative des charges qui pesaient sur Guillaume Seznec. Bien que celui-ci niât toute implication dans le meurtre présumé de Pierre Quéméneur, il n’avait pas échappé au magistrat instructeur que Seznec mentait, tergiversait, soudoyait, niait des faits pourtant indiscutablement prouvés, établissait des faux en écriture pour se disculper de l’accusation qui pesait sur lui, provoquait de faux témoignages moyennant finance pour confirmer son alibi.
Tenter de s’évader à plusieurs reprises était-il le meilleur moyen pour faire admettre son innocence ?
Toutes les assertions, tous les alibis de Seznec étaient vérifiés par le juge Campion qui s’aperçut que rien ne tenait. Il clôturait son information judiciaire, riche de quelque 507 pièces, par une ordonnance accablante d’indices graves et concordants contre Guillaume Seznec.
Le réquisitoire du procureur de la République allait dans le même sens de la culpabilité. Preuve du sérieux de la phase instruction, la chambre des mises en accusation (juridiction d’instruction du 2ème degré) demandait un supplément d’enquête portant sur dix-sept points de détail. Ce fût ensuite l’acte d’accusation qui renvoyait Seznec devant la Cour d’Assises.
Comme dans chaque affaire judiciaire médiatisée, la presse s’empare de l’événement, le corrompt et le pollue définitivement. Je ne prendrai qu’un seul exemple : les désastres humains provoqués par l’interventionnisme néfaste des médias dans l’affaire dite du petit Grégory. Mais il est légitime à chacun de constater les effets pervers de la désinformation de certains médias dans quelques affaires judiciaires contemporaines qui ont défrayé la chronique.
Je pensais naïvement que cette quête du sensationnel n’avait pas cours au début du XX ème siècle ! C’est le comportement et les excès de la presse écrite qui, à mon avis, expliquent la survivance de cette affaire. La presse qui s’était érigée en substitut de la justice dans le bras de fer qui opposait les familles Seznec et Quéméneur. Résultat, depuis l’arrêt de condamnation, c’est le condamné qu’on ovationne, la famille de la victime qu’on humilie, les enquêteurs que l’on culpabilise, la justice que l’on dénigre. Triste constatation qui a toujours cours. Inquiétant !
L’auteur cite dans son ouvrage une littérature abondante, et fait souvent référence à des articles de presse, preuves que l’activité journalistique était importante. Les journaux, politisés et partisans, avaient pris fait et cause pour la famille Quéméneur ou celle de Seznec. Ils tenaient leurs lecteurs en haleine en faisant preuve d’une imagination débordante, émettant des hypothèses aussi farfelues que fumeuses. Le citoyen suivait le roman-feuilleton, faisant plus confiance aux articles forcément sensationnels qu’aux investigations de la justice. On pourra toujours reprocher aux enquêteurs d’avoir bâclé leur travail, à la justice d’avoir des œillères pour avoir négligé les pistes de ces incorruptibles free lance ! Quatre-vingts ans après, nous en sommes toujours là !
Il n’a pas échappé à Bernez Rouz que la rigueur professionnelle n’était pas le point fort des grands chroniqueurs de l’époque. Il ne fait d’ailleurs qu’une confiance limitée aux écrits du temps, s’étant rendu compte du déphasage des articles de presse avec les pièces du dossier. Les méthodes d’hier ne sont-elles pas toujours d’actualité ?
L’activité démesurée de la presse, par ses approximations, ses assertions, ses allégations, l’exploitation de rumeurs teintées de mystères, ses enquêtes parallèles sans distanciation aux faits est le fondement de l’idée que la condamnation de Guillaume Seznec est une erreur judiciaire.
Bernez Rouz nous révèle qu’à l’époque les citoyens qui composaient le jury étaient au nombre de douze (neuf actuellement) et que ceux-ci ne se prononçaient que sur la matérialité des faits et la culpabilité de l’accusé ; le prononcé de la peine en cas de culpabilité reconnue par le jury populaire était à la charge du président de la cour et des assesseurs. Les jurés non professionnels, livrés à eux-mêmes, redoutant la sévérité des magistrats, prononçaient des acquittements abusifs (30 à 40% des affaires.) Ce n’est qu’en 1941 que le délibéré devenait commun et portait tant sur la culpabilité que sur la peine. Les acquittements devenaient plus rares (10%). La justice devenait-elle plus rigoureuse ou plus impartiale ?
Deux personnages de cette affaire étaient aussi confrontés à l’actualité judiciaire : Jeanne Seznec, fille de Guillaume Seznec, et François Le Her qui l’épousa en secondes noces ; tous deux parents de Denis Le Her Seznec porte drapeau des innocentistes, et petits-fils de Guillaume Seznec.
François Le Her, personnage trouble, au passé tumultueux, collaborateur de l’occupant allemand allait répondre à plusieurs reprises de ses actes. Accusé de viol il était acquitté par les assises du Finistère. Grâce à la providence d’une lettre apocryphe il échappait à une condamnation de viol sur mineure. Il était aussi incarcéré pour attouchements sexuels, et détenu pour des faits de collaboration. Quant à Jeanne Seznec, elle était acquittée par la Cour d’assises du Finistère. Pourtant n’avait-elle pas reconnu avoir tué son mari, François Le Her, de trois balles de revolver le 3 octobre 1948 ? L’on comprend le fardeau familial porté par Denis Le Her Seznec et son combat, pathétique et désespéré, pour la réhabilitation de son grand-père.
Si l’on peut sur le plan humain comprendre la démarche d’un petit-fils et ses emballements, à la différence de ceux des tiers, il faut cependant raison garder. C’est à mon sens un combat perdu d’avance tant le faisceau de présomptions et les éléments à charge contre son aïeul sont graves et concordants.
En fonction des éléments relatés par Bernez Rouz, je n’aurais probablement pas été tourmenté par le doute. J’aurais, en mon âme et conscience, comme les jurés de l’époque, déclaré Guillaume Seznec coupable du meurtre de Pierre Quéméneur. Je n’aurais pas admis la thèse de la préméditation et j’aurais considéré que Seznec était coupable du faux en écriture privée.

Je pense que ce billet doit rejoindre ses conclusions !
Qu’il soit remercié de son message de soutien.

Georges Cenci

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